Axes de recherche

Notre groupe interuniversitaire vise l’approfondissement des savoirs francophones en sciences humaines et sociales, ainsi que la formation de la relève en recherche au Québec, au gré d’une programmation scientifique élaborée autour du thème de la médiatisation du politique.

Axes de recherche

Afin de répondre au double objectif d’approfondissement du savoir scientifique et du développement de la formation en recherche au Québec, la programmation de recherche du Groupe de recherche en communication politique s’organise autour du concept de médiatisation du politique.

La médiatisation désigne les transformations sociales et culturelles induites par les technologies et les organisations communément appelées « médias », à travers les relations que les individus et les institutions entretiennent entre eux·elles et avec leur environnement. Ces transformations se caractérisent par une dualité : elles se manifestent simultanément par l’intégration des médias au fonctionnement des institutions sociales, de même que par leur développement en tant qu’institutions sociales autonomes et animées de « logiques » propres de fonctionnement. Ainsi, l’activité sociale serait plus dépendante qu’autrefois des médias et de leur mode de fonctionnement. Le concept de médiatisation du politique désigne l’ensemble des transformations générées par les médias dans les relations entre les acteurs et actrices (citoyen·ne·s, partisan·ne·s, personnalités publiques, organisations (non) gouvernementales) et les institutions politiques.

Les projets de recherche menés au GRCP sur la médiatisation du politique se déclinent en trois axes qui permettent d’affiner la compréhension de cette réalité, tant d’un point de vue théorique qu’empirique.

Axe 1 : Les transformations de la médiatisation du politique

Ce premier axe se consacre à l’étude des transformations de la médiatisation du politique, dans un contexte de changements médiatiques accélérés, de reconfiguration des écosystèmes médiatiques et d’affirmation du rôle des plateformes numériques commerciales dans la circulation de l’information politique. Durant le cycle de financement précédent (2018-2022), nous avons assisté à une accélération de certaines dynamiques qu’il semble important d’étudier afin d’en comprendre les ramifications et les impacts sur les mouvements sociétaux et démocratiques. Ces transformations sont marquées notamment par des dynamiques de personnalisation, de spectacularisation et d’intimidation, jouant sur des registres psychoaffectifs et identitaires (Collingnon et Rüdig 2020; Lalancette et Raynauld 2020). Elles font également état d’une « audiencization » (Schroder 2019), où les publics sont étudiés de manière granulaire, et d’une plateformisation marquées par la communication directe avec des publics, le contournement des médias traditionnels et l’emploi de stratégies favorisant le partage à grande échelle au sein des environnements numériques (van Dijck et al. 2018). Enfin, les transformations de la médiatisation du politique sont étroitement associées à la communication algorithmique et à l’utilisation de données massives par les acteurs·actrices de la médiatisation du politique (Stromer-Galley 2019; Theviot 2019; Woolley et Howard 2018).

Cet axe se consacre spécifiquement à l’analyse détaillée des transformations de la médiatisation du politique, qu’elle présente, définit et caractérise, tout en étudiant les manières avec lesquelles celles-ci modifient les pratiques de médiatisation du politique. Ce nouvel axe regroupe 6 projets sur lesquels les cochercheur·e·s travailleront au cours du cycle actuel de financement. Brin pilote en collaboration avec Giasson, Landry et Mahéo une étude expérimentale sur la désinformation chez les jeunes adultes. Dufresne continuera son chantier sur l’acceptabilité sociale de l’intelligence artificielle et des données massives. Dubois étudie comment le ciblage de la communication auprès des électeurs intervient dans les campagnes municipales québécoises. La stagiaire postdoctorale Reetz (boursière FRQSC, UQAM), a poursuivi des recherches sur les processus de normalisation fasciste dans le discours populiste contemporain.

Axe 2 : Les acteurs de la médiatisation du politique

Le second axe de la programmation propose de s’éloigner de la notion de « publics » employée lors du dernier cycle de financement afin de s’intéresser plus largement aux acteurs et aux actrices. Le passage à la notion « d’acteurs·actrices » permet une focale sur le caractère actif, dynamique et multidimensionnel de la médiatisation du politique ainsi que de situer les différent·e·s intervenant·e·s dans des « rôles » et fonctions qui alternent notamment entre la réception, la production et la diffusion d’information. Ceux-ci regroupent principalement les acteurs·actrices politiques institutionnel·le·s (gouvernements, partis politiques et leurs membres, groupes d’intérêt), les citoyen·ne·s (fréquemment réuni·e·s en groupes et en associations) et les acteurs·actrices médiatiques, c’est-à-dire les individus et les institutions qui colligent, mettent en scène, commentent et diffusent l’information politique sur diverses plateformes (Boulianne et al. 2020; Boulianne et Larsson 2021; Dubois et al. à paraître; Lalancette et al. 2019; Penney 2017).

Cet axe se consacre à l’étude et à l’analyse des caractéristiques (structure interne, mode organisationnel, composition du membership, priorités politiques) des acteurs·actrices qui influencent l’environnement ou le champ politiques, ainsi qu’aux relations communicationnelles que ces acteurs·actrices entretiennent entre eux·elles. Cette perspective interroge également les ressources, les compétences et les savoirs dont disposent les divers·es acteurs·actrices, notamment en matière de jugement critique, d’évaluation de l’information et de maîtrise technique des médias numériques, dans un contexte marqué par la multiplication des voix, des stratégies et des espaces de communication politique (Giasson et al. 2019; Gibson 2020; Grusell et Nord 2020; Montigny et al. 2019; Theviot 2019). Huit projets de recherche sont menés au sein de cet axe. Giasson poursuit sa collaboration avec Lupien (Brock) d’un partenariat auprès d’organisations de femmes autochtones des Amériques désireuses de développer des actions numériques de représentation politique. Daignault continue ses recherches sur les campagnes de communication climatique. Lalancette et Yates développent leur chantier sur la communication citoyenne numérique lors de controverses sociales. Les recherches doctorales de Castel (UQAM) sur les dynamiques d’acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique et celles de Sullivan (boursière FRQSC, UdeM) sur les usages que font les maires et mairesses du Canada des médias socionumériques contribuent aussi au développement des savoirs sur cet axe.

Axe 3 : Les pratiques de médiatisation du politique

Le troisième axe de la programmation procède à l’étude des pratiques de médiatisation du politique. Deux dimensions sont constitutives de cet axe : les pratiques médiatiques et les pratiques discursives employées par les acteurs·actrices de la médiatisation du politique dans leurs activités de communication. Par « pratiques médiatiques », il est entendu les usages délibérés et répétés de médias traditionnels ou numériques afin de produire, de modifier, de diffuser et de contrôler des informations, de les partager auprès de divers publics, ainsi que les activités de mise en visibilité d’acteurs·actrices, d’enjeux et de thèmes dans des médias de masse grand public (Marland 2016, 2020; Giasson et al. 2019; Giasson et al. 2018; Giasson et Dubois 2019). Les « pratiques discursives » regroupent quant à elles les performances, les rhétoriques et les activités de mise en scène employées par les acteurs·actrices afin de convaincre, de séduire, de mobiliser des appuis et des publics, d’affaiblir des adversaires et d’occuper l’espace médiatique (Lalancette et Raynauld 2020; Penney 2017; Turbide 2019).

Cet axe porte sur l’analyse des processus collaboratifs, compétitifs et conflictuels par lesquels les acteurs·actrices du politique, mobilisant diverses pratiques médiatiques et discursives, s’emploient à mettre à l’ordre du jour public et à définir en leurs propres termes d’autres acteurs·actrices ou des enjeux sociopolitiques particuliers. Il fait état du caractère « construit », du cadrage, de phénomènes sociopolitiques présentés par des acteurs·actrices comme des « problèmes » appelant à l’action politique, distribuant les blâmes et les responsabilités et proposant des actions présentées comme des solutions adéquates (de Vreese 2005; Entman 1993, 2004, 2013; Giasson et Dubois 2019; Lemarier-Saulnier 2016). Enfin, il positionne l’usage de médias numériques, ou encore l’instrumentalisation des institutions médiatiques grand public, dans le cadre de répertoires dont peuvent se saisir les acteurs·actrices dans leurs activités de médiatisation politique. Quinze projets sont menés par les chercheur·e·s de l’équipe dans cet axe. Par exemple, Turbide et Yates poursuivent leurs travaux sur les représentations des relations publiques dans les médias d’information. Lalancette et Gosselin mènent des travaux sur la rhétorique morale dans la couverture médiatique des scandales politiques. Landry approfondit ses travaux sur les représentations médiatiques de l’assistance sociale au Québec. La recherche doctorale de Dupont (boursière FRQSC, UdeM) sur la médiatisation des questions de genre et celle de Beaumier (ULaval) sur le recours stratégique aux mythes populistes dans le discours politique s’inscrivent dans cet axe.